- Votre date de naissance ? - Le 22 février... - Quelle année ?

« NewJ ça suffit, tu viens ici maintenant. »

Je siffle le pomsky qui revient en sautillant, excité comme tout, sentant sans doute mon propre contentement ; qu'on me comprenne, mon mec sort de l'hosto aujourd'hui, c'est une nouvelle merveilleuse parce que j'en pouvais plus de tourner en rond dans ce putain d'appart.
Même pas la Jungle pour se consoler, à quel point c'est nul ?!
La police a fini par foutre le camp du Nautilus, et j'ai pu réinvestir les lieux, pour découvrir évidemment que mes poissons du lac Malawi avaient tous crevé. Les rascasses ont résisté, mes grandes saloperies à moi.

Ça m'a pas fait autant plaisir que de retrouver Nasdrovie et Ragnarok dont j'ai vite repris les soins – vous me connaissez maintenant, vous savez à quel point je peux être chiant... Ils se sont assez vite remis ; Ragnarok galope comme personne sur trois pattes, et Nasdrovie n'est plus sonnée comme quand elle est rentrée.

Je me dirige vers la clinique après avoir emprunté la bagnole de Valentina comme d'hab pour ramener mon soldat à la maison. D'après ce que j'ai compris, il a mille trucs à signer sauf j'espère le paiement de la clinique sinon on est pas dans la merde.

« Coucou chéri ! »

Je débarque telle la reine des folles, entouré par trois mini spitz au comble de la joie, dont Ragnarok qui à force de s'agiter comme ça pour montrer sa joie sur sa patte folle va finir par tomber. Je récupère Nass qui a encore du mal à rester debout trop longtemps.

« T'es prêt à sortir ? »

Je porte son alliance sur le pouce, jette un coup d'oeil un peu inquiet par-dessus mon épaule ; je vais pas cacher que je suis assez inquiet depuis tout ce merdier.

Ton internement s'est mieux passé que tu ne l'aurais pensé ; disons que tu n’as pas viré dingue comme tu étais persuadé de le faire avec ton malaise névrotique en présence des hôpitaux. En vérité ce sont les visites régulières et invasives de ton mari qui t’ont aidé à tenir, rythmant ton séjour et te rassurant continuellement sur le rapprochement de la date de ta sortie.
Loués soient ton appétit sexuel et ta curiosité dévorante qui t’ont guidé vers cette grande folle dramatique il y a deux ans.

Alyosha est précédé d’une petite troupe de chiens complètement tarés comme d’habitude, et ton cœur se serre quand tu retrouves enfin ton petit Ragnarok violenté par ces abrutis, qui lui ne semble avoir aucun souvenir. Il te recouvre les mains de bave, te faisant te rappeler que tu portes encore la bague de ton mari au seul doigt qui peut l'accueillir.

-Hey, le salues-tu de manière plus mesuré.

Tu fais glisser ta main jusqu’à la sienne pour lui passer de nouveau sa bague au doigt dans ce mouvement touchant et significatif pour vous deux.

-Putain t'as pas idée.

Tes lèvres courent sur sa joue jusqu'à sa bouche que tu embrasses et tu passes ton sac sur ton épaule sans parvenir à calmer ton Ragnarok sautillant.

-T'es en voiture ?

Je suis ridicule, poursuivez-moi en justice : quand Niilo me passe mon alliance qu'il a précieusement gardée tout au long de son séjour à la clinique à mon annulaire, j'ai des papillons dans le ventre.
Je ronronne quand il m'embrasse – déclenchant par là même une crise d'éternuements jaloux de Ragnarok parce que c'est lui le plus content ici nom d'un spitz ! –, hoche affirmativement de la tête à sa question :

« Yep, j'ai emprunté la voiture de notre fidèle Valentina ; il faudra quand même qu'on pense à en acheter une, ça va être utile. »

Avec la Minette notamment si personne entretemps n'a l'idée fort peu drôle de mourir dans d'atroces circonstances parce qu'on a eu la bonne idée de travailler dans l'illégal ; ah misère ! Nasdrovie cale son petit corps contre moi manifestement heureuse de ne pas avoir à marcher et j'entraîne mon mari et mes chiens dans mon sillage jusque sur le parking de la clinique. Je ralentis en pressentant qu'il va allumer une cigarette, et puis ouais je profite du soleil printanier... et j'observe les environs des fois qu'il y ait des gens louches & armés.

« Tiens donne-moi ta main. »

Je cale ma chienne sur mon bras de manière à pouvoir lui remettre son alliance au bon doigt.

« J'ai déjà racheté plein de trucs pour reconstruire la Jungle. Oh et j'me suis inscrit à la fac aussi. »

-Quand on aura Minette oui.

Vous l'appelez tellement ainsi qu’on va finir par mettre ça sur son extrait de naissance, et en même temps ça permet sans nul doute de ne pas rendre trop concret tout de suite la naissance de la demoiselle qui commence à se faire sacrément proche.
Et c’est bien le problème d'ailleurs, car on en a de nouveau après vous et tu t'es demandé plusieurs fois si Alyosha re-ferait le coup de la grenade si c'était sa fille qu'on venait lui prendre cette fois-ci.

-Comment va Ness ?

Elle n’est plus repassée depuis que tu as été interné ici, grâce à elle d’ailleurs en premier lieu, se contentant de prendre des nouvelles à distance sans en donner elle-même.
Tu lui redonnes ta main pour qu'il puisse te filer ton alliance et te sens soudain moins nu et vulnérable avec elle. Tu gratifies Nass d’une caresse et t’allumes effectivement une cigarette quand vous sortez. Avec un temps d'arrêt sur la dernière phrase.

-À la fac ? Tu dors deux heures par jour avec tes activités actuelles et tu rajoutes encore un truc ?

Tu lui adresses un regard appuyé, plus inquiet que reprobateur ; il veut se tuer ou quoi ?!

C'est con mais ce bout de phrase fait battre un peu plus vite mon cœur parce qu'on dirait un petit coin de soleil après un orage ; quand on aura Minette, oui. Je fais mon sourire de gosse à mon mari, tout content qu'il ait lu dans mes pensées – chh je suis con comme ça :

« Oui ! »

J'aurais bien aimé avoir une Mini rouge pétasse mais je crois l'avoir déjà dit ; et puis de toute manière avec 6 chiens, un chat, un norvégien pour mari et la mère de ma gosse qui restera dans les parages parce que personnellement je trouve cool que sa maman fasse partie de sa vie et c'est pas négociable.
Eh bien je suis plutôt parti pour une putain de grosse bagnole.

« Elle va bien, je crois. Ça l'a pas mal secouée toute cette histoire, tu sais, je crois qu'on lui devra une thalassothérapie de princesse quand elle aura accouché. Entre Kekali et ça, elle aura pas été épargnée pendant sa grossesse, manquerait plus qu'elle fasse du diabète de gestation et ça serait la totale. »

Nasdrovie couine de manière trop mignonne en remuant la queue quand Niilo la caresse, et je m'appuie des reins contre la bagnole citadine de Valentina.

« C'est pour des cours de compta, j'en ai marre de sous-traiter celles du Chat et du Nautilus, et j'ai pas mal de raisons de penser que je me fais enfler par le type que je paye. Vaut mieux que je sois diplômé avant la naissance de la Minette, et je fais ça en cours à distance, je devrais gérer. »

« Du quoi ? » demandes-tu distraitement, tes yeux suivant une silhouette que tu crois avoir reconnue mais dont tu attribues l’intérêt à la même paranoïa dont souffre Alyosha depuis les derniers événements.

Comme d’habitude il a parlé super vite et avec des mots compliqués en plus là donc t’as strictement rien compris ; t’espères juste toi aussi que Neslihan ira bien jusqu’au terme de sa grossesse et que Minette va voir le jour dans de bonnes conditions.
Et ça commence par le fait que ton mari survive jusque là ce qui n’est pas gagné avec une telle hygiène de vie.
Ses arguments sont parfaitement valides mais ils ne te conviennent pas ; sans doute parce que tu estimes que tu en as le droit après avoir failli crever entre autres par sa faute, tu décides, pour une fois, d’ouvrir ta gueule.

« Regarde-toi... » soupires-tu. « Qu’est-ce que tu cherches à faire au juste ? »

Tu lèves les yeux au ciel, tires sur ta clope et réfléchis à la façon dont tu vas dire les choses, comme toujours pour le préserver, avec ta splendide diplomatie. Tes yeux clairs se plantent dans les siens, dont il faut savoir qu’ils sont bleus pour arriver à en discerner les iris vu comme ils sont éclatés par la fatigue et d’autres trucs.

« T’es épuisé. Le Chat et le Nautilus te prennent déjà un temps fou, Neslihan te prend du temps, et tu veux faire quoi, te rajouter du taf ? C’est quoi le projet, combler les rares vides ou tu pourrais genre, dormir ? »

Activité qui a du sortir de son vocabulaire depuis un moment. Tu lui effleures la joue du bout des doigts, soulignes d’un mouvement tendre la fossette qui se creuse quand il sourit.

« Je t’ai toujours suivi et soutenu dans ce que tu faisais, mais Minette va te demander un temps fou. Sans aucune pause tu vas finir par exploser. Je serai toujours là si tu as besoin mais...juste, pense à faire attention à toi. »

Je perds un petit peu de mon sourire parce qu'il n'est pas emballé par mon idée que moi je trouvais géniale, et que ça n'arrive pas souvent ; c'est pas que Niilo est tout le temps d'accord avec moi – pas du tout – c'est juste que d'habitude il ne le dit pas aussi ouvertement.
Je fronce du nez quand il demande si j'essaie d'arrêter de dormir, et ça me tire un petit rire vu sa façon drôle de présenter la chose. Je le laisse s'approcher, me caresser la joue, fixant enfin mon attention ailleurs que sur les passants.
C'est bien mieux de regarder mon mari, moins stressant.
Je lui embrasse la main.

« Je ferai attention promis et j'aurais toujours du temps pour Minette t'façon. »

Enfin si on se débarrasse de ces types qui veulent kidnapper mon soldat, je pourrais ptêt même l'emmener au travail !
Je commence à vraiment me projeter dans le projet d'avoir un gosse, un vrai, au rythme de la grossesse de Neslihan. J'ai lu des bouquins de psychologie, il paraît que c'est normal, et que je vais être forcément déçu de ne pas avoir le mouflet que j'aurais rêvé ; mais bon là on parle de Nadeshda Kourakine, elle sera forcément géniale.

« Minette aura besoin de toi aussi, hein », je fais remarquer légèrement, et pour ça il faut qu'il reste en vie, ça serait genre, bien.

Je crains fort que sans mon mari ma santé mentale foute le camp aussi rapidement qu'un plan cul à l'audition du mot « engagement ». Je tourne la tête pour embrasser le poignet de Niilo là où son pouls bat, et lui pique sa cigarette pour la terminer, lui faisant signe de prendre place dans la voiture de Valentina.

« Tu veux rentrer où ? C'est toi qui décide », j'offre, dans un élan rarissime parce que c'est toujours moi qui commande d'habitude, une fois derrière le volant.

« Et moi ? » échappes-tu soudainement.

C’est extrêmement rare que tu cherches l’attention d’Alyosha – que tu cherches l’attention tout court. Soit tu attires celle des gens malgré toi, soit tu fais preuve d’un talent redoutable pour te faire discret.
Mais oui, parfois, tu regrettes de n’être plus le centre de son monde ; tu regrettes qu’il vire doucement vers l’âge adulte ; tu regrettes le temps où vous ne viviez pas ensemble et où tu le retrouvais pour baiser avec comme si vous ne vous étiez pas vus pendant des lustres. Avant c’était normal qu’il te manque : il était quasiment inaccessible.
Maintenant…

« Oublie ça. » finis-tu par lancer, embrassant son front. « Je serai là pour elle, tu n’as pas de souci à te faire. »

Comme t’as été là pour Yngvil quand elle a appelé à l’aide il y a deux ans.
Tu te glisses dans la toute petite voiture, Ragnarok dans les bras. Ton petit bout de chien plein de poils se faufile sur tes cuisses et s’y fait un nid, la queue battante, animé par une joie touchante de te retrouver. La porte se refermant, Alyosha te pose une question ma foi intéressante qui te fait faire le tour de tes souvenirs.
La Lanterne a été détruite, la première jungle n’existe plus, la seconde n’existe plus, l’appartement est habité par deux femmes que tu apprécies mais qui ont aboli définitivement ta tranquillité. Qu’est-ce qu’il reste ?
L’image d’une forêt norvégienne sous la neige te revient à l’esprit.

« Sincèrement ? Je sais pas s’il y a vraiment quelque part où on peut rentrer. Nos débuts me manquent, j’aimerais retourner en Norvège, en Russie même si tu veux, même en France si t’en as envie, pour retrouver ce qu’il y avait autrefois, ce « rien » tranquille qu’on avait décidé de bousculer avec nos bêtises parce que nos vies étaient décidément trop simples. »

Mais évidemment c’est impossible.
Tu poses ta tête contre la vitre et fermes les yeux.

« Choisis. Moi je préfère rêver. »

Je pince les lèvres quand il déclare que c'est à moi de choisir après une tirade dont je ne sais absolument pas quoi penser ; j'ai de nouveau la désagréable impression que je ne sais pas trop qui est à côté de moi mais pas le soldat invincible dont j'ai l'habitude.
Pour autant, personnellement ça me va très bien qu'il essaie de mettre des mots sur ce qu'il ressent sans me faire le coup de l'iceberg voire pire le coup du « je rentre au pays » – oui je sais ça fait longtemps qu'il l'a pas fait, mais il a parlé de la Norvège là.
Je me tords pour déposer Nasdrovie à l'arrière, New Jersey la rejoint et je lui ordonne d'être gentil avec elle.

Je repense à la scène que m'a tapé Fayne quand elle a appris que Neslihan était enceinte, et j'ai une amertume qui n'a rien à voir avec la cigarette que j'ai terminé qui m'envahit la bouche.

« Attend, j'ai une idée. »

C'est une spéciale Kourakine ça : action, réaction. Je mets le contact et, faut-il le dire, je conduis comme un parisien.
C'est-à-dire que je tape un texto en même temps, sans que ça m'empêche de klaxonner sur une mamie trop lente. On se retrouve donc bientôt – trop vite – devant la résidence des Lilas – quel nom débile.

« Attend-moi la, garde la voiture, je reviens », je fais de mon ton d'Altesse sérénissime.

« J’ai peur quand tu dis ça. » murmures-tu, la tête toujours appuyée contre la vitre quand il te confie avoir une idée.

Alyosha a l’idée artistique, ce qu’on appelle plus communément « l’inspiration » ; il a soudainement un truc en tête et il ne le lâche pas d’une semelle jusqu’à ce qu’il l’ait mis à bien – tu en as fait les frais un certain soir d’octobre alors que tu lui disais adieu en lui expliquant que tu devais rentrer en Norvège.
T’espères soudainement qu’il ne va pas se tourner vers toi et te dire quelque chose du genre : « Je vais chercher Ness, partons élever des yack en Norvège. ».
Tu te redresses quand il stationne – à la parisienne donc « dépose sa caisse n’importe comment en plein milieu de la route avec le contact encore fait » - devant le Parking, prêt à descendre comme si on vous attaquait de nouveau, mais il te demande d’attendre ici et de garer la caisse.

« Euh, d’accord. »

Ta docilité parfaite signera ta perte.

Je remonte à l'appart en deux deux, et ne laisse même pas les chiens me faire la fête correctement – ce dont ils sont déçus. Ils se consolent hyper vite quand ils remarquent que je m'empare de leur bouffe pour l'emmener, et que je file dans la piaule le temps de faire un sac.
Ils aiment presque plus partir en weekend que moi. Nemo dormait sur le lit, se réveille quand je débarque en furie – oui je suis suffisamment bruyant pour réveiller un chat.

« Viens mon bébé on s'en va. »

Il miaule, saute du lit et se tire pour aller dans l'entrée et n'être surtout pas oublié. Je n'oublie pas de prendre Godzibite parce que si on l'a pas Ragnarok n'aura pas son jouet préféré – non une patte cassée ne l'empêche pas du tout de courir après des trucs pour les ramener, il sait ce qu'il veut ce chien dans la vie.
Mon téléphone bipe dans la porte arrière de mon jeans, et je le dégaine alors que je fais sortir les 3 chiens restants de la troupe et mon chat, un sac sur l'épaule. J'y ai même collé les affaires de sport de Niilo des fois qu'il soit en état d'aller courir ou je ne sais quoi.

Tout le monde dévale les escaliers joyeusement, et ils se tassent sagement à l'arrière, alors que je mets les sacs dans le coffre de la mini voiture.

« On s'en va en weekend. »

Je vérifie que personne ne va nous percuter en faisant demi-tour alors que Nemo insiste pour se mettre sur mes genoux. Je peux te dire que je lui fais vraiment confiance pour le garder là alors que je conduis, mais il est super sage et ne bouge plus.
(C'est pas la première fois que je le fais et je sais c'est débile et blabla, mais c'est mon chaton je peux difficilement lui résister.)

« J'ai pas envie que t'aies l'impression d'être mis de côté parce que putain c'est pas le cas... »

Je passe la première et démarre sous le nez d'un scooter ; il m'insulte mais Valentina a une essence et j'accélère rapidement.

« Donc on se tire dans le New-Jersey. »

Alyosha se barre comme la tsarine qu’il est et tu passes sur le siège conducteur en essayant de ne rien péter cette fois-ci, avant de manœuvrer la boîte de conserve de Valentina pour la garer correctement et proche de l’entrée. Tu en profites pour faire sortir les chiens pour qu'ils puissent se dégourdir les pattes et pisser un coup, et t’allumes une clope en attendant ton mari.
L’époque où tu filais les clés de ton appartement à celui qui n'était qu'un plan cul pour qu'il monte chercher ton chien est terriblement loin.

Tu jettes un regard aux chiens multiples qui l'entourent quand il redescend, salue Nemo qui vient mrouter autour de tes chevilles et l’interroges silencieusement quand tu vois qu’il glisse un sac dans le coffre.
Attends. Il fait quoi là.

-Hein ?

Tous les chiens grimpent dans la voiture à et tu es bien obligé de suivre le mouvement, à l'avant. Tu manques de dire à ton mari que c’est trop tard, que tu as déjà cette sensation depuis longtemps, mais il te coupe le sifflet en manœuvrant et en t’annoncant direct que vous allez dans le New Jersey.
La destination la plus proche qui ait une signification pour vous.

-Pardon ?! Mais, avec la caisse de Val ? Et tu laisses Ness toute seule ?!

Il monte dans la voiture en voyant que la troupe d'animaux suit mon impulsion, et heureusement qu'il le fait sinon j'aurais été capable de péter un câble là maintenant tout de suite dans la plus pure tradition Kourakine. Il pose quand même des questions que j'estime être légitimes – ??? – alors que je manœuvre de nouveau pour sortir la bagnole de la place de parking qu'il a trouvé que je savais même pas existante ici.
A l'arrière les chiens s'organisent entre eux entre préférences et habitudes, tout calmes, et Nemo ronronne sagement sur mes cuisses en pensant que quand je bouge pour passer les vitesses c'est juste pour lui plaire, et sa naïveté est à la fois mignonne et bien pratique, du coup.

« Oui on y va avec la caisse de Val, et je laisse Ness toute seule elle survivra très certainement un weekend toute seule un weekend même enceinte. »

C'est sans appel, c'est comme-ça-et-pas-autrement et sûrement que Nessie va m'engueuler après – à moins qu'elle ne trouve mieux à faire entretemps je ne sais pas –, mais moi j'en ai besoin. Sentir mon mari s'éloigner comme ça, le plus sereinement du monde, et qu'on vienne pas me dire que ça n'est pas ce qu'il fait, c'est affreux.
La gamine je l'ai faite principalement pour lui même si je suis ravi que Ness soit là, du coup le plan c'était pas de l'échanger contre un mouflet, en fait.

« J'en ai marre qu'on se parle plus et qu'on se croise plus, c'est le remède parfait. »

Si ton instinct de protection pulse intensément quand Alyosha maintient que vous partez sans Ness, celui, un peu plus possessif qui est relié à lui, ronronne d’un contentement pas super sain. Tu te mords toutefois le coin de la lèvre avec contrariété.

-Elle va nous faire une crise et je te parle même pas de Fayne…soupires-tu.

Et vu son état d’agacement Alyosha a l’air d’être en train d'en faire une lui aussi, ce qui te permet de te rappeler pourquoi tu ne dis jamais sincèrement ce que tu penses : c’a effectivement tendance à donner des trucs comme ça parce que quand il est motivé, Alyosha part au quart de tour.
Tu glisses un regard pas convaincu vers ton mari quand il dit qu'il en a marre de plus te parler et te croiser ; c’est pourtant la même personne qui t'annonce s'être rajouté des occupations supplémentaires.

Les chiens finissent de s’organiser à l'arrière. Sobaka, Norne et Nell qui sont les plus grands se sont installés sur la place disponible et les plus petits se sont calés entre eux. Ragnarok a cependant préféré rester à l'avant pour plusieurs raisons discernables. Tu caresses son poil, lui faisant émettre un couinement d’approbation.

-Merci, finis-tu simplement par dire.

Il me parle des crises de Fayne et de Ness, que je sens venir aussi, mais tellement fort ! Et je lui fais un sourire de gosse :

« Je m'en fiche. Enfin non, ça me fera chier quand elles le feront. Mais hé je suis marié avec toi on se croise jamais en ce moment, c'est juste... nul ? »

Je tends la main par-dessus le levier de vitesse pour lui toucher la cuisse en espérant que ça ne soit pas là où il ait mal.

« Je t'aime et je ne veux pas que tu te sentes mis de côté. Vraiment. Nemo tu me griffes chaton. »

Comme par magie il détend les griffes et j'ai de suite moins mal.

« Oh il conduit trop mal celui-là attend... »

Je double à la sauvage un new-yorkais qui m'envoie me faire enculer – « merci j'ai tout ce qu'il faut » – reprends :

« Attend qu'on soit dans le New-Jersey. »

On descend de la voiture après une heure et demie de route, et les chiens sont évidemment les premiers dehors. Bien sûr qu'on est à la cabane de la Faramine, et bien sûr que je fais un sourire de gosse à mon mari alors que Nemo descend de la voiture pour aller explorer.

« J'adoooore cet endroit. »