(I) Le gosse parfait, les bonnes manières, le sourire angélique, l'enfant trop sage, le rêve parental espéré. Toujours poli, toujours bien mis, le chérubin bien-aimé, le môme préféré à l'autre. Minuscule diablotin électrique, fanfaron avide de bêtises, instigateur du courroux des géniteurs glissant prématurément sur la pente infernale. (II) Le souffle justicier qui l'habite chaque instant, qui lui insuffle le cran de se lever le matin, d'enfiler ses rangers et de partir en chasse. La quête du pourri, du malin qui ronge les entrailles putrescentes du quartier. Puis les susurres perturbateurs du frère, son estomac grondant et son appétit grandissant. Les coups de mâchoire en plein cœur de ses valeurs, le loup qui dévore et se repaît avec délice des lambeaux restants de sa morale. (III) La frustration aux bords des reins cambrés par un acte sans passion, cette lèvre mordue à sang pour réprimander un plaisir suspendu à l'éclatement qui piétine ses principes d'antan. Impudicité inhabituelle, faveur profonde du corps auquel il ne peut déroger pour quelques secondes d'extase. Une faveur accueillie les cuisses écartées. (IV) Les jeux de morveux, le son des balles recrées à la bouche, les phalanges croisées pour faire croire à un pistolet. Le prix du flic trop fier du haut de son petit mètre qui piège son voleur, le jean crade, les genoux en sang d'avoir trop poursuivi la racaille en couche culotte. Puis la puissance du véritable pétard, le son du plomb qui lacère les tympans, la trace de poudre qui arrache les poumons, la tripaille qui s'étale dans le fossé et le frangin qu'il n'a jamais parvenu à chopper. (V) La minuscule incohérence, la chair esquintée, l'hideuse marque au mollet apposée par le canidé du jumeau. L'unique divergence organique qui les démarque, point imperceptible dans un océan de similitudes. (VI) Le recyclage de données susceptible d'écorcher la grandiloquente ascension du roi, les phalanges acérées capable d'accéder aux fragiles bases de données. L'esprit affûté rendant des services au frangin contre un peu d'amour tabou, la frousse qu'une future arrestation finisse par se pointer pour terminer par moisir derrière les barreaux d'une taule de haute sécurité. (VII) Le revolver tantôt fixé à sa ceinture, tantôt planqué sous son oreiller, unique pouvoir de soumission, de respect et de crainte en sa possession. La mitraille brûlante à peine défouraillée dans la poitrine tiède et inerte du belligérant. Les poignets défaillants, la sueur spontanée de la nuque, la réaction emportée de l'esprit face à l'immobilisme du tronc. Baptême du dernier soupir, premier coup de craie sur son tableau des macchabées. (VIII) Jeu de rôle entre jumeaux. Figuration inversé, doublure raté du despote. La copie au rabais, le faussaire au talent discuté. Les putains s'y méprennent contrairement au chien, les crocs en avant, ouvrant sa gueule pour signaler sa découverte de la supercherie a un kilomètre à la ronde. Persona non-grata des relations charnelles, travestissant sa similitude dans le rôle du sultan s’arrogeant les pouvoirs établis d'avance sur un harem aux milles délices. (IX) Manie ordonnée d'avoir ses objets à leurs places, système huilé à la perfection avant l’apparition du rouage défaillant. Le bordel de la colocation, le matériel qui disparaît pour récidiver autre part, l'amas de déchets ambulant qui s'empile, le chaos sans fond et les nerfs qui craquent. La voix qui jure et le matos qui vole et se fracasse contre les cloisons.  (X) L'attrait du bien depuis tout gamin, l'envie d'aider son prochain. Il est le chevalier servant ployant le genou devant les écorchés de l’existence. Ramassant dans son char mécanique les paumées en route avant que quelqu'un d'autre ne les capture pour ensuite les remettre le long du pavé. Paladin balourd aux épaules massives de la tâche qu'il l'incombe.

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