Un soir, la mort est venue le chercher. Elle est repartie sans lui. Partie remise.
Sa naissance, sa renaissance: Peu importe qui sont ses parents aux yeux des lois, ils s'en sortent blancs comme neige. Quelques imperfections au niveau de leur dossier judiciaire, mais rien de méchant. Après avoir vécu une longue vie trépidante, comblée par le bonheur et l'argent, ces deux idiots choisirent de changer de direction dans leur vie. Un enfant est né. Lui. La balle de calibre .50 qui leur traversa le crâne simultanément fut révélatrice de la couleur de leur dossier. Non pas blanc comme neige, mais rouge sombre, singulièrement de la même nuance que la marre de sang grossissant autour de leur cadavre. On ne tue pas un enfant. Pas tant qu'il est innocent. Mais le sang attire le sang. Aucune famille ne le retenant ni ne l'élevant, Il grandit peu à peu, la part d'enfant qu'Il avait en lui n'avait que peu subsisté. Effacé partout, dissimulé par l'hypocrisie de la société l'entourant. Il sombre dès son début d'adolescence dans les addictions. Souffrance d'autrui, auto-destruction, découverte. De ville en ville, Il passe de foyer à foyer. Oxford, échec. Dieppe, échec. Salamanca, échec. La seule chose qu'Il réussissait était l'école. Il aimait apprendre. Les sciences ne lui échappaient en rien, les langues le nourrissaient de nouveauté et de possibilités. Anglais, Espagnol, Français, quelques notions en Italien, Portuguais et Allemand. Puis vinrent les addictions chimiques. Ces dernières le plongèrent dans un état mental tellement différent de tout ce qu'il avait pu connaitre. Il se mit à toucher à tout ce qui lui vint sous la main, le nez et jusqu'à la veine de son bras. Peu importe la molécule, le voyage n'était que nouveau, et novateur pour lui. Mais lorsqu'il s'en est fallu de peu pour qu'Il ne revienne pas de l'une de ses excursions mentales, son pied était trempé jusqu'à la hanche dans ce nouveau monde à explorer. Du haut de ses 17 ans, Il voulait plus. L'héritage de ses parents commençait à s'amenuir, et loin d'être un simple d'esprit, Il voulait s'assurer une vie fructueusement facile à vivre. Mais Il ne savait pas où Il avait posé ses pieds. Il ne le savait pas encore. C'est à partir de cet instant, où Il vendit son premier sachet de poudre blanche, neigeuse, qu'Il vit la rougeur du ciel du monde dans lequel Il venait de se plonger. Le sang attire le sang. Empruntant les traces de ses parents, Il avançait avec de l'assurance, mais une assurance fragile. Une fragilité qui détruit.
Le sang, la drogue: Les liens du sang sont forts. Même une fois que vos liens sont brisés par la mort. Ils ne le sont pas véritablement. Les chiens n'engendrent pas des chats. L'évolution pousse nos descendants F1 à avoir un génotype partagé entre les deux parents, mais aussi à ajouter un petit quelque chose, ce quelque chose faisant qu'Il vivra plus longtemps, ou non, qu'Il s'adaptera mieux, ou non. L'évolution, tout simplement. Pourtant, la plupart des espèces disparaissent un jour ou l'autre, s'étant mal adaptées. Seul un petit pourcentage s'en sort vainqueur dans ce combat à la vie. Son petit quelque chose qui changeait de ses géniteurs, c'était la drogue, par sa consommation. Ses parents avaient fait une affaire florissante, vendant kilo après kilo, puis demi tonne par demi tonne, mais jamais au grand jamais ils ne touchaient à ce qu'ils vendaient. Ils savaient toute la merde qu'il y avait dans ces flocons destructeurs. Il avait plongé tout d'abord dans cette saloperie appellée drogue. Coco, Corinne, Caro, mais n'oublions pas son vrai nom: Cocaïne. Barcelone, 19 ans. Il voyait son traffic disparaitre petit à petit. Pas bonne chose. Ne jamais laisser ses fournisseurs disparaître, ou alors prévoir. Prévoir avant que ce ne soit trop tard. Un autre gros bras, proclamaît avoir la meilleure came de la Catalogne. Quelques jours lui suffirent pour se retrouver dans un coffre. Emmené, un sac sur la tête, Il se retrouva assis sur une chaise rustique. Le sac arraché de sa tête, Il put enfin voir qui était cet homme. Un vrai petit Pablo Escobar. Cigare, verre de Whisky 18 ans d'âge, de belles chevalières aux mains. Un tatouage ornait son crane rasé, du barbelé. Chaque noeud de barbelé correspondait à un an en prison. Il ne réussit pas à les compter. Le salaud le regardait dans les yeux. Une lueur d'incompréhension fit son apparition. “Tu as les yeux d'une personne que j'ai fait tuer il y a quelques années, avec sa femme. Je n'aime pas tes yeux.” Quelques secondes suffirent à Josh pour qu'il comprenne. Il était venu dans l'antre du diable qui avait arraché ses parents à la vie. Quel hasard. Le sang attire le sang. Sans même savoir ce qu'il faisait, le poignard planté dans l'érable noble du bureau ne prit qu'une seconde à se planter dans le cou du malfrat. Pas un bruit. Des cordes vocales noyées dans le sang ne font qu'un bruit de gargouillement. Le regard etonné du dealer ne comprit pas comment ce jeune crétin avait pu déjouer sa surveillance aussi rapidement, et provoquer son arrêt cardiaque. Jamais il n'aurait pensé que ce maigrichon aurait pu avoir du courage. Aucun garde ne l'avait suivi dans le bureau, il n'y avait normalement pas de risques à se retrouver en face d'un jeune futur client. Sauf quand ce dernier est la progéniture de son prédecesseur, qu'il avait tué pour monter sur son trone de sang.
Welcome in Amerika: Il replaçait ses lunettes sur son nez, lorsqu'Il entendit les hauts parleurs de l'aéroport déblaterer la suite de chiffres et de lettres qui constituaient le numéro de vol inscrit sur le papier cartonné de son billet. Un passeport réaliste, qui passait casimment toutes les frontières. A la suite du meurtre de Barcelone, Il s'était enfui. Rapidement. Ce n'était que la veille que ses mains eurent été salies par le sang. Le carrelage blanc sale solidement collé au sol le replongeait dans la sombre découverte qui l'avait changé à jamais. Après avoir entendu le verre brisé, Il s'était rué dans la salle de bain. Ses parents gisaient, tous deux, la vie les ayant quitté. L'impact sur le mur carrelé avait fait voler en éclat plusieurs carreaux. Parti loin dans ses pensées, Il avait lentement et imperceptiblement fermé ses yeux. Il les rouvrit, ressortit de son passé froid, et se dirigea vers le terminal correspondant à son vol. Onze heures plus tard, Il posait les pieds en Amérique. Du liquide, des faux papiers réalisés avec soin, son mal être. Il n'avait rien oublié d'important. Un concessionaire, une voiture, un plan de route, mais aucun plan d'arrivée. Un Hotel, un dealer. C'est la règle en général. Il continuait sa vente petit à petit mais la population locale lui faisait comprendre qu'on ne voulait pas de lui. Tous les mois, parfois moins, parfois plus, Il décampait. Au volant, Il roulait des heures durant. Ecoutant ce que son instinct lui proposerait. Mais Il ne lui proposait jamais rien. Rien de concret. Il se plongea dans certaines substances psychédéliques qui semblaient lui indiquer la bonne voie, mais l'étaient elles vraiment, rien n'en est moins sur. LSD, Mescaline, Salvia, tout passait. Son mental avait beau vriller, Il avait fini par se mettre en route au lever du soleil un jour d'automne ensoleillé et frais. Sa perche du soir passé l'avaient fait se lever, prendre les clés posées sur la commode, et rouler en direction de l'Est. Un petit écriteau l'avait arrêté: Appartement à louer. Bienvenue chez toi, se dit-Il malgré lui.