Quelque chose s’éteint dans la lueur fantastique de ses yeux noirs alors qu’il râle et s’étend là, sur le dos. C’est la fièvre qui retombe alors que son corps tremble encore sous l’impact, ses poils bruns s’hérissant comme de légers piques au contact de l’air ambiant. Faisait-il si froid dans cette pièce, lorsqu’ils y sont arrivés ? La sueur perle sur sa peau d’enfant, celle de quelqu’un qui a grandit trop vite. De l’homme il n’a même pas encore tout à fait la voix. Sa mue est longue, change son ton en des rythmes brisés qui, on le lui a assuré, le flattent plus que ne le trahissent. Ce sont des lèvres plus charnues qui caressent pourtant ce corps d’enfant, s’y arrêtent pour y déposer un baiser, respirer son odeur. Lui ne bouge plus, étendu comme un fauve entre les draps, le regard masqué derrière une épaisse boucle brune. « Qu’est-ce que t’es beau, Faust… Bordel. » Jure la blonde dans un presque patois, se redressant pour attraper son paquet de cigarettes. Ses mots écorchent ses lèvres de poupée de cire, il l’admire du coin de l’oeil sans répondre, admirant comme sa bouche se tord lorsqu’elle jure. C’est comme un oiseau qui meurt en plein vol. Il tend les doigts pour lui arracher son butin, portant la clope allumée à ses propres lèvres dans un pillage purement égoïste. Il n’a que quinze ans et déjà tout son esprit. Du personnage de Goethe il a la folie, celle d’avoir vendu son âge à son âge. Depuis toujours peut-être. Mais la nuit est sombre et il tire paresseusement la couette vers lui, d’un air presque boudeur. Le petit prince veut sa nuit de sommeil et il sait que sa nounou prendra toujours le temps de veiller sur lui. Ce n’est pas qu’il n’a pas grand sentiment pour la belle Tracy dont les cheveux blonds rivalisent avec le clair d’un soleil matinal, mais de sept ans sa cadette, il n’a jamais su déterminer s’il l’aimait pour elle-même ou pour son petit appartement. C’est vrai qu’elle est belle pourtant Tracy, avec la fumée de ses clope qui vient flouter ses traits fins, désirables. C’est vrai qu’elle n’avait pas vraiment prévu d’héberger un petit connard de quinze ans qui la traite plus mal qu’une chienne. C’est vrai qu’elle l’aime sans doute plus que lui ne l’aime. Mais bon dieu ce qu’elle l’aime. « T’es croyant Fausty ? » Fais doucement une voix du dessous, une envolée de cheveux couleur noisette s’échappant de sous la couette. Son visage s’essuie lentement les lèvres en suçotant son doigt alors qu’elle tend à son tour la main vers Stacy pour réclamer une clope. « Va te faire enculer. » Lâche la blonde dans une jalousie mordante. Faust frissonne en étirant ses membres fins, ceux de la toute jeunesse. La plus brune se contente alors simplement de jouer avec le pendentif du collier de son amant qu’elle a entre les doigts, d’un air boudeur. « J’sais pas trop. » Fait le brun d’un air un peu incertain, daignant enfin répondre. « J’veux dormir. » Il réclame en plus, dans la même ingratitude du nourrisson qui a fini de téter. C’est Fidji la première qui vient se coucher contre son torse, narguant sa rivale du regard en s’y étendant de tout son long. Tracy soupire, abandonnant la chaleur plus réconfortante de sa clope pour les bras de son amant, plongeant ainsi la chambre dans le noir. Cet amant, ça fait deux ans qu’elle le partage avec mille garces à la fois. Elle le fait parce qu’elle l’aime. Et le pire, c’est qu’elle sait très bien qu’il va partir, un jour ou l’autre, cet enfoiré. Qu’il disparaîtra du jour au lendemain de cet appartement empestant les femmes qu’elle a appris à supporter pour lui, qu’il la laissera seule avec ses amours étouffants qu’elle n’a pourtant pas choisi et auxquels elle s’était pourtant promis de ne pas céder : et qu’il le ferait sans le moindre regard en arrière.
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BLABLAH SUITE EN COURS.