il faut d'abord faire semblant de l'être.
on reçoit toujours le costume avant la carrure qui le complète.
- Le Jeune Con
pour certains, le premier jour de leur vie marque le début de leur histoire. si tel était son cas, fauve ne serait pas fauve. elle, elle fait plutôt parti des autres. de ceux dont le passé ne compte pas pour le présent, de ceux pour qui le début n'a plus rien à voir avec maintenant. si elle était le personnage d'un roman, on pourrait dire qu'elle est passée de la belle au bois dormant à nikita. littéralement. elle ne se rappelle pas du premier livre. du début de son récit. elle a oublié les jolies robes à fleurs, les bonnes manières et de toute la gentillesse dont elle pouvait faire preuve. sa bienveillance. sa naïveté. mais tout ceci ne lui appartient plus désormais. plus rien de son enfance n'existe, pas même le souvenir de son véritable prénom.
de son passé ne lui reste qu'une chose. un fragment laissé par sa mémoire, qui n'est pas dû au hasard. parce que c'est là que tout a commencé, à ce moment précis que sa vie a changée. elle n'avait pourtant rien fait de mal. quelques bêtises par-ci par là pour se faire accepter. pour se rebeller, changer qui elle était. dans un pays qu'elle ne connaissait pas, une ville différente de toutes celles où elle avait déjà vécue. elle ne voulait plus être la petite fille sage. il fallait qu'elle grandisse plus vite, qu'elle casse son image. qu'elle s'intègre. alors pour un délit qu'elle n'a jamais commit, pour protéger ceux qu'elle pensait être ses amis, ils l'ont arrêtée. elle paraissait si jeune, si innocente pour commettre un tel acte. mais elle n'en a pas démordu. ils ont alors fini par la croire, l'envoyant à l'abattoir. un centre de détention pour jeune délinquant. une véritable jungle pour une jeune adolescente si sensible. pourtant, cet endroit a été son meilleur moyen de forger un caractère en acier. c'est là-bas qu'elle a appris à ne plus avoir peur. de personne. parce qu'elle a fini par elle-même leur faire peur. toutes ses émotions, celles qui pouvaient la fragiliser, commençaient à disparaître. ne restait plus que le vide de l'âme.
peu de temps avant son seizième anniversaire, ils l'ont libérée. ce n'est pas une jeune fille qu'ils ont laissés sortir, mais un fauve. et il était hors de question pour elle de revenir dans sa famille trop bien rangée. elle n'avait pas fait tout ce chemin pour redevenir qui elle était. alors de relation toxique à relation vénéneuse, elle en est venue à rencontrer celui qui allait finir le travail. un homme de plus d'une trentaine d'années, que le vice avait marqué au fer rouge. leur rencontre aurait pu être fatale. en haut d'un immeuble abandonné, elle venait de le surprendre à commettre l'irréparable. dépourvue de peur et surtout totalement inconsciente, elle fit un pas bruyant en avant pour lui signifier sa présence. avec une rapidité déconcertante, l'homme se retourna et la mit en joug. « je veux apprendre. » dit-elle simplement sans le quitter des yeux. il hésitait. ça n'a pas duré très longtemps, mais elle a vu qu'il hésitait. puis elle ferma les yeux, se disant qu'elle ne perdait pas grand-chose à mourir. il allait tirer quand une voix féminine sortie de nulle part. « mauve ? » demanda cette voix, interrompant l'action de l'assassin qui restait silencieux. « keera ? » s'étonna la blondinette en rouvrant les yeux, sans oser se tourner vers elle. cette voix fluette, elle l'avait parfaitement reconnue. elle appartenait à sa plus grande alliée de pénitence qui l'avait sauvée de quelques situations embêtantes. « faut se tirer. » dit enfin l'inconnu en quittant les lieux avec une rapidité et un calme déconcertant. keera pris sa main et l'emmena, la faisant monter dans une voiture qui attendait en bas. si l'histoire a commencée dans le centre de détention, l'aventure quant à elle débuta à cet instant précis. en moins d'une semaine, elle se retrouva au japon sans savoir pourquoi ni comment. l'homme de l'immeuble, qui ne la lâchait plus d'une semelle, lui avait imposé une règle simple. pas de questions. si elle dérogeait à la règle, tout s'arrêtait là pour elle. sa quête, mais aussi sa vie.
un an. on ne se rend pas bien compte des conséquences du temps. tout ce qui peut changer en une petite année. à quel point ces jours peuvent paraître longs pour certains. c'est le temps qu'il lui a fallu pour devenir un monstre. une chose à l'allure humaine dépourvue de cœur. ils l'ont surnommée the cat. pas besoin de faire un dessin pour comprendre. rapide, agile et discrète, elle entre et sort où bon lui semble. tout est calculé, rien n'est laissé au hasard. et si un imprévu survient malgré toutes ses précautions, son instinct prend le pas. son étrange prénom lui vient de là. en changeant une lettre, elle changea son histoire. mauve n'était plus. effacée, enterrée, oubliée. définitivement. devenue tueuse de sang froid, capable de se servir de n'importe quelle arme. d'une intelligence redoutable. rien de tout ça n'est inné. il lui a fallu des heures d'entraînements. et tout autant de temps pour apprendre la base de nombreuses langues, devenir une adversaire de taille à tous types de jeux de stratégie. quant au peu de quartier libre qui lui était accordé, elle l'utilisait pour lire et enrichir sa culture. apprendre à palier les lacunes qu'elle avait accumulées en n'allant pas en cours. c'était annoncé, elle voulait devenir la meilleure dans ce que l'on fait de pire. elle a réussi.
pour son premier contrat, elle est revenue dans le pays qu'elle avait quitté sans aucun regret. ce retour ne lui a fait ni chaud ni froid. après tout, son passé n'existait plus. son enfance était déjà envoyée aux oubliettes et les quelques souvenirs de sa vie ici commençaient à en faire de même. elle exécuta sa mission avec une rapidité et une précision déconcertante, presque effroyable. ce n'était que son tout premier meurtre. il y en eut quelques autres, tout aussi bien orchestrés. il y eut aussi quelques braquages. sans accrocs non plus. une petite vie plutôt tranquille à ses yeux, qui rapporte très bien. seulement, ce n'est pas suffisant. déjà parce qu'elle s'ennuierait le reste du temps, mais aussi parce qu'il serait évident qu'elle cache quelque chose. alors à côté de sa passion lugubre pour le crime, elle s'est trouvée un passe-temps de serveuse très enrichissant. humainement parlant. c'est fou tout ce que l'on peut apprendre sur la complexité des relations humaines en les observant. tout comme on peut entendre pas mégarde la femme d'un fédéral expliquer que son mari rentre tard le soir à cause d'une enquête plus complexe qu'il n'y parait. le présumé coupable aurait été innocenté. le crime aurait été relié à un autre pourtant déjà résolu. n'attendant pas plus de détails, notre monstre aux cheveux blonds cessa d'écouter et reprit son service normalement.
quand on fuit, on fait tout pour ne pas éveiller les soupçons mais aussi pour ne pas laisser de trace. un prétexte simple, comme le besoin de quitter cette ville à cause d'un petit ami violent. un billet d'avion pour une ville située dans l'état d'à côté. le reste se fait sans réfléchir. une occasion en entraînant une autre, elle s'est finalement retrouvée à l'autre bout du pays. et en quelques heures passées dans cette nouvelle ville, elle trouva le lieu idéal. un vieil immeuble plutôt tranquille caché en plein bronx. personne ne viendrait la chercher ici temps qu'elle se tenait tranquille. se trouvant un emploi de fleuriste, elle se fondit dans la masse suffisamment longtemps pour que personne ne se pose des questions sur elle. d'ailleurs, elle n'avait même pas été suivie. mais quand on se sent en sécurité, les mauvaises habitudes reviennent au galop. il lui a suffit de faire une mauvaise rencontre, une seule. et son havre de paix s'est transformé en prison dorée. elle voulait simplement reprendre du service. elle avait juste besoin de sa dose d'adrénaline. voilà où mènent les pulsions. on s'enterre soi-même dans une ville qui n'a pas demandée à être le jardin d'une énième mauvaise plante.
quand j'étais petite, j'avais peur des araignées.
on me disait qu'elles ne ressentaient aucune émotion.
que leur cœur ne battait pas. maintenant, je sais ce qu'il en est.
c'est au moment de tuer qu'elles se sentent le plus en vie.
on me disait qu'elles ne ressentaient aucune émotion.
que leur cœur ne battait pas. maintenant, je sais ce qu'il en est.
c'est au moment de tuer qu'elles se sentent le plus en vie.